Comment s’élabore le champagne ?
Saviez-vous que la grande majorité des vins blancs de Champagne sont obtenus à partir raisins rouges (Pinot Noir et Pinot Meunier) ? C’est pourquoi l’on parle de « blancs de noir », pour les distinguer des « blancs de blanc », bien plus rares, obtenus généralement à partir du Chardonnay.
Cépages de la Champagne
L’AOC Champagne autorise sept « cépages » sur les 34’200 hectares de vignes de l’appellation (à titre de comparaison, la surface viticole de Suisse n’est que de 14’629 hectares) : Pinot Noir, Pinot Blanc, Pinot Gris, Pinot Meunier, Chardonnay, Arbane et Petit Meslier. Je mets volontairement des guillemets à « cépages », car trois d’entre eux ne sont que des variantes du Pinot Noir. En effet, la génétique est formelle : le Pinot Gris, le Pinot Blanc et le Pinot Meunier ne sont rien d’autre que des variations génétiques du Pinot Noir, des chimères pour être précis. D’un point de vue génétique et ampélographique, j’affirme donc qu’il n’y a que quatre cépages autorisés en Champagne : le Pinot (avec ses variantes Noir, Blanc, Gris, Meunier), cépage-roi de la Champagne qui couvre 69 % des surfaces (dont 31 % pour le Pinot Meunier), le Chardonnay avec 31 % des vignobles, puis les très rares Arbane et Petit Meslier qui couvrent à eux deux moins de 1 % des surfaces.
À noter que le Pinot Meunier est très souvent appelé « Meunier » tout court. Il s’agit là d’une tournure sémantique que je ne soutiens pas, car elle vise de manière pernicieuse à faire croire que c’est un cépage distinct !
La Méthode Champenoise
Selon la légende, ce serait le fameux moine bénédictin Dom Pérignon qui aurait inventé vers 1660 la technique pour faire mousser le vin de Champagne en bouteille, ce que l’on appelle aujourd’hui la « Méthode Champenoise ». En réalité, il l’a seulement importée de Limoux où la technique était déjà connue par les producteurs de blanquette de Limoux un siècle auparavant. Cela dit, grâce à ses travaux minutieux sur la taille et les techniques culturales, Dom Pérignon a quand même joué un rôle important dans l’amélioration de la qualité des vins de Champagne.
Bien qu’elle n’y ait pas été vraiment inventée, cette méthode est devenue rapidement l’apanage de la région de Champagne. D’ailleurs, depuis les années 1990, les autres régions qui produisent des vins effervescents avec cette technique ont l’interdiction d’utiliser le nom Méthode Champenoise, et doivent parler de Méthode Traditionnelle.

Vendanges
Elles sont manuelles, surtout pour le Pinot Noir et le Pinot Meunier, car l’éclatement de leurs peaux pourraient entacher le jus.

Pressurage
Les raisins encore sur la grappe doivent être pressés frais et rapidement afin d’éviter toute macération et toute oxydation.

Vin de base
C’est un vin « tranquille » (c’est-à-dire non mousseux), produit par la fermentation alcoolique standard, et qui repose en cuves ou en contenants en bois.

Assemblage
Pour composer les différentes cuvées, on assemble des vins de base issus de cépages, de crus et même de millésimes différents. Cette opération est réalisée à la fin de l’hiver.

Tirage
Avant la mise en bouteilles, on ajoute à l’assemblage la « liqueur de tirage », un mélange de sucre, de levures et de vin des années précédentes. Les bouteilles sont ensuite obturées avec une capsule couronne, comme celles des bouteilles de bière. Les levures font fermenter le sucre et dégagent du CO2 qui se dissout dans le vin et qui formera des bulles après ouverture. Cette deuxième fermentation est nommée « prise de mousse ».

Vieillissement
Les bouteilles couchées reposent plusieurs années sur les lies formées par les levures qui sont mortes à la suite de la deuxième fermentation. Le vieillissement sur lattes dure généralement 2-3 ans pour les champagnes non millésimés, et souvent beaucoup plus pour les millésimés.

Remuage
Les bouteilles sont placées sur des pupitres, inclinées en direction du goulot afin d’y faire descendre les lies formées par les levures mortes. Les remuages (rotation des bouteilles) sont quotidiens, et l’inclinaison augmente au fur et à mesure sur plusieurs jours, jusqu’à la position verticale. Cette opération traditionnelle est aujourd’hui souvent automatisée à l’aide de gyropalettes.

Dégorgement
Cette opération permet d’éjecter le dépôt de levures en congelant le goulot dans un bain de saumure à -25°C, créant un petit glaçon qui contient le dépôt, glaçon qui sera expulsé par la pression lors de l’ouverture de la capsule.

Dosage
La perte de vin lors du dégorgement doit être compensée par l’ajout d’un vin de plus ou moins sucré appelé « liqueur d’expédition » ou « liqueur de dosage ». Selon la quantité de sucre ajouté, le champagne sera : Brut Nature ou Non Dosé (0 g), Extra-Brut (0-6 g/L), Brut (<12 g/L), Extra-Sec (12-17 g/L), Sec (17-32 g/L), Demi-Sec (32-50 g/L), Doux (> 50 g/L).

Bouchage
Afin de pouvoir résister à la pression, le bouchon de liège pour les champagnes est bien plus gros que celui des vins tranquilles. Sa forme d’origine est cylindrique, et c’est après son insertion partielle par forte compression dans le goulot qu’il prend sa forme caractéristique de champignon. Afin d’éviter qu’il ne sorte sous la pression du gaz dissous dans le vin, il est coiffé d’une plaque en fer-blanc sertie d’un fil de fer préformé appelé « muselet », qui est solidement fixé au goulot.